11ème rencontre des PC (16) - KPL (Luxembourg): « Nous manquons cruellement d'une base d'analyse des causes de la défaite du socialisme à l'Est »
26 janv. 2010 Intervention du Parti Communiste Luxembourgeois (KPL)
« Nous manquons cruellement d'une base d'analyse des causes de la défaite du socialisme à l'Est »
Intervention d'Ali Ruckert, président du KPL
Traduction JV pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Chers camarades,
En 2009, pour la première fois depuis des dizaines d’années, le nombre total de salariés au Luxembourg a diminué, le taux chômage atteignant officiellement 7,1 % de la population active. Beaucoup d’entreprises dans l’industrie ont désormais recours au travail à temps partiel ; le nombre des faillites a augmenté et les capitalistes s’efforcent d’utiliser cette situation économique difficile pour comprimer les salaires et remettre en cause les conquêtes de générations de travailleurs.
Le gouvernement luxembourgeois ajourne depuis 2006 l’ajustement automatique des salaires sur l’inflation et continue sa politique de redistribution « du bas vers le haut ». Le pouvoir d’achat est en baisse, 14 % de la population vit déjà en-dessous du seuil de pauvreté. La dette publique grimpera à 19,8 % du PIB d’ici la fin 2010. La « Chambre du Travail », organisme censé assurer la participation des travailleurs, reconnaît elle-même que la part des salaires dans la valeur ajoutée diminue depuis plusieurs années. Aucun doute possible : les travailleurs vont payer pour une crise dont ils ne sont pas responsables.
Malgré cela, lors des élections parlementaires du 7 juin 2009, les partis pro-capitalistes, les politiciens qui se sont réclamés ces dernières années des idées néolibérales et qui les ont mises en œuvre dans notre pays, ont obtenu plus de 95 % des voix.
Le Parti Communiste Luxembourgeois, qui présentait pour la première fois depuis 15 ans des candidats dans toutes les circonscriptions du pays, a augmenté son nombre de voix de 35 %, pour obtenir 1,5 % des suffrages, résultat malheureusement insuffisant pour obtenir un siège au parlement.
Les partis qui soutiennent le système capitaliste n’ont pas perdu de terrain, et la coalition entre le Parti Populaire Chrétien-Social et le Parti Socialiste va de nouveau gouverner le pays pendant 5 ans. Le gouvernement sortant a en effet mis en avant son « sauvetage » des deux principales banques du pays à coup de milliards d’euros, et la maintien ainsi de plusieurs milliers d’emplois. Il a accordé des cadeaux financiers aux électeurs quelques semaines avant le scrutin, et lancé un plan d’investissements publics pour soutenir les petites et moyennes entreprises. Toutes les mesures impliquant des sacrifices en matière de droits sociaux, d’assurance-maladie ou de retraite ont par contre été repoussées à après les élections.
Malgré les dégâts qu’elle cause, la crise capitaliste n’a pas encore touché la majorité des travailleurs, et beaucoup de gens pensent encore que la crise ne sera pas aussi difficile que ce que l’on pouvait craindre. Ils voient leurs emplois menacés, mais espèrent que la crise ne sera que passagère. Ils se voilent la face, et reprennent bien souvent à leur compte les arguments simplistes des populistes de droite, accusant les étrangers et les travailleurs immigrés d’être responsables de leur situation, des menaces sur l’emploi et de la pauvreté qui les guette.
Mais il ne faudrait pas pour autant sous-estimer le rôle d’un certain nombre de tendances de longue durée.
Tout d’abord, la conscience politique de la classe ouvrière est bien plus faible aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a 20 ou 30 ans, même si bien des travailleurs commencent aujourd’hui à douter du système capitaliste. Pour la grosse majorité d’entre eux cependant, le capitalisme continue d’offrir une base matérielle appréciable, si bien qu’ils ne voient aucune raison de se battre pour un autre ordre économique. En tant que communistes, nous devons leur proposer une alternative crédible. C’est une exigence pressante, si l’on veut que la majorité de la classe ouvrière, qui a objectivement intérêt à l’abolition du capitalisme, puisse soutenir une alternative communiste et travailler activement à un changement réel.
La défaite du système socialiste, qui fut d’une importance capitale et causa des pertes lourdes à chaque parti communiste et à l’ensemble du mouvement communiste, continue d’avoir d’importants effets sur le continent européen. Le lavage de cerveaux anti-communiste est omniprésent, non pas seulement dans les campagnes de propagande comme celle a laquelle nous assistons depuis ces dernières semaines avec l’anniversaire de la dite « chute du Mur de Berlin », mais aussi par le truchement d’institutions comme l’école ou les grands médias bourgeois.
Même si plusieurs partis communistes y travaillent actuellement, nous manquons cruellement d’une base commune d’analyse des causes de la défaite du socialisme, d’une évaluation des diverses expériences et de leurs réalisations, de leurs faiblesses et de leurs lacunes, ainsi que d’une analyse des contradictions survenues lors de la construction de la société socialiste. Nous pensons que 20 ans après nous devons redoubler nos efforts communs en ce sens.
Cette analyse répond à un besoin urgent, si nous voulons être à la hauteur des enjeux, lorsque dans les années à venir la crise capitaliste s’approfondira et que la recherche d’alternatives se fera plus pressante. Elle sera la première des conditions d’une convergence de vues entre nous. Nous aurons alors à nous entendre sur les critères et les caractères d’une alternative socialiste, sur le développement des forces productives et des marchés dans des conditions socialistes, sur le mode de régulation de l’économie, sur les traits généraux d’une planification socialiste efficace, sur les formes de la propriété sociale, sur la construction de mécanismes juridiques et institutionnels de l’exercice du pouvoir ainsi que sur le mode d’exercice par la classe ouvrière de la prise de décision dans l’économie et dans la société.
Dans ce travail d’élaboration conceptuelle, nous devrons respecter les particularités nationales ainsi que l’existence de niveaux de développement différents entre les pays.
La condition préalable à tout cela est que tous les partis communistes et ouvriers qui adhèrent à la théorie de Marx, Engels et Lénine, à l’internationalisme prolétarien et à la construction d’une société socialiste ressentent la nécessité d’une forme globale et structurelle de coopération. Une telle structure commune est nécessaire depuis bien des années déjà, mais cela ne sera possible que si les partis communistes posent concrètement les jalons d’une structure de caractère permanent, pour que nous puissions trouver des réponses concrètes aux problèmes auxquels nous sommes confrontés et débattre d’actions communes.
Merci beaucoup de votre attention.
Commenter cet article