Sur la question Kurde et l'interdiction du DTP

Communiqué du Bureau Politique du Parti Communiste de Turquie (TKP)

Traduction JC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

Tout le monde sait que la dissolution du Parti pour une Société Démocratique (DTP) est une décision “politique”. La question Kurde ne peut pas être traitée par des jugements juridiques, en particulier au moment où la menace d'une guerre civile est à l'ordre du jour, dans notre pays. La décision de dissoudre le DTP vise à dresser un peuple contre l'autre, en restreignant le droit des Kurdes à faire de la politique.

La soi-disant « Initiative Kurde », dont l’intitulé et les objectifs sont encore indéterminés, lancée par le Parti de la Justice et du Développement (AKP) fait certainement partie d'un plan Américain, malgré le démenti de Erdogan et de ses compères. La dissolution du DTP cadrait avec ces plans, et donc l'aval nécessaire de Washington a été obtenu.

La tournure des événements indique que les autres acteurs de la vie politique, au-delà de l'AKP, le Parti Républicain du Peuple (CHP), le Parti d'action nationaliste (MHP), ainsi que les Etats-Unis donc, souhaitaient ou convenaient de la nécessité de la dissolution du DTP. L'attaque armée à Tokat, le fait qu'elle ait été revendiquée par le PKK un jour avant la décision de la Cour Constitutionnelle, et les déclarations des dirigeants politiques Kurdes selon lesquelles « le DTP ne remplit pas son rôle » sont des signes évidents indiquant  qu'il faut prendre en compte. Il apparaît que de telles déclarations ne servent pas les demandes d'égalité du peuple Kurde, dont la légitimité historique est incontestable.

Le temps où on luttait contre les « sales » politiques, « sans scrupules » et « souterraines », de l'impérialisme, de l'AKP et de l'opposition bourgeoise avec une action politique sincère, reposant sur des principes et honnête est révolu depuis longtemps. Afin d'éviter que nos peuples s'entretuent, pourtant ume telle pratique politique doit devenir dominante, en particulier en ce qui concerne la question Kurde. Il est impossible de développer une ligne politique au nom des masses laborieuses, au nom du peuple, en acceptant la polarisation actuelle par rapport au problème Kurde tel qu'il se présente ou en se positionnant par rapport à cette polarisation.

Dans ce contexte,

1 – Dans la droite ligne des principes affichés en de nombreuses occasions, le Parti Communiste de Turquie (TKP) continuera à poursuivre une ligne politique juste et révolutionnaire, en ne séparant pas la question Kurde des autres problèmes du pays et de la région. Dans le fond, cette ligne politique repose sur:

a) L'élimination de toutes les dispositions légales, politiques, culturelles et idéologiques qui discriminent le peuple Kurde, nient même son existence et les empêchent de parvenir à l'égalité au sein de la nation;

b) Etant donné qu'une telle égalité est seulement possible sous le socialisme et avec la libération de la classe ouvrière en Turquie, le problème Kurde s'insère donc dans la question importante des luttes des masses laborieuses;

c) Défendre les revendications à l'égalité du peuple Kurde (bien que l'expérience vécue ait démontré toute la difficulté de ce type de prise de position), ne peut qu'aboutir à une satisfaction partielle de ces exigences dans le système actuel.

d) Séparer ces revendications des plans destructeurs des Etats-Unis et de l'UE pour la Turquie et la région, et empêcher qu'elles servent des activités menées dans un sens réactionnaire et visant au renforcement de l'exploitation;

e) Construire l'unité de tous les travailleurs et des pauvres contre le système capitalisme, le pillage impérialiste et la réaction.

2 – Le TKP appelle tous les révolutionnaires, les patriotes, les forces de gauche, et les masses laborieuses de Turquie à adopter des positions anti-capitalistes et anti-capitalistes avant qu'il ne soit trop tard. Seule cette prise de position empêchera des négociations secrètes et des conflits sanglants. Aussi longtemps que la Turquie restera dans l'axe des Etats-Unis, sous le contrôle de l'Union Européenne, gouvernée par des partis comme l'AKP ou d'autres du même type, il n'y aura pas de paix possible et d'apaisement pour les Turcs et les Kurdes.

3 – Le TKP demande à ce que les opérations militaires menées sous prétexte de « lutte contre le terrorisme » et les attaques armées menées au nom de la « pacification », tout comme les déclarations qui affaiblissent la confiance et la sympathie entre les peuples, soit stoppées immédiatement.

4 – Le TKP affirme que la violence « aveugle » contre des personnes, civils et moyens de transport public ne fait qu'envenimer le conflit, et il condamne de tels actes. Le TKP appelle tous les éléments du mouvement révolutionnaire à prendre position contre de tels actes.

5 – Le TKP appelle tous les patriotes à rester vigilants et à prendre position contre les attaques et les tentatives de lynchage visant les Kurdes, certaines d'entre eux étant orchestrées par l'Etat, d'autres menées par des groupes organisés fascistes et enfin certains étant spontanés. Le TKP appelle toutes les forces progressistes à empêcher de tels actes et à élaborer des méthodes efficaces pour faire échec aux campagnes psychologiques visant à dresser un peuple contre un autre.

6 – Le TKP déclare que dresser les « forces populaires » Turques et Kurdes les unes contre les autres n'est acceptable en aucun cas; c'est une attitude méprisable que de semer la discorde entre les peuples par un bras de fer puéril pour savoir quel peuple est supérieur, plus courageux, ou plus fou. Le TKP rappelle que, comme dans toute nation, il y a des bons et des mauvais, des justes et des lâches, des exploités et des exploiteurs, des oppresseurs et des opprimés, et il y en a chez les Turcs et chez les Kurdes aussi.

7 – Le TKP ne participera pas à toute acte de solidarité politique ou à toute plate-forme qui ne se dissociera pas explicitement des plans impérialistes et des projets politiques réactionnaires, et ne soutiendra psa l'unité des Turcs et des Kurdes de la manière la plus claire. Le TKP ne restera pas sans voix face à toute initiative qui sert les intérêts de l'impérialisme, de la réaction et des classes exploiteuses. C'est aussi une manifestation de notre plus profond respect et de la fraternité qui nous anime envers ceux qui expriment leur volonté de se dissocier des plans impérialistes et de la réaction.

8 – A ce stade, le TKP se sent obligé de dire que, le danger monte alors que de moins en moins de gens se soucient de la menace qui pèse sur la pays, en dépit du fait que l'on répète cela fréquemment, et il reste très peu de  temps à ceux qui parlent de patriotisme, de fraternité, de paix, d'indépendance et de progressisme pour adopter des prises de position justes, courageuses et indépendantes. Le TKP ne perdra pas ce temps précieux.

Site du Parti Communiste de Turquie: http://www.tkp.org.tr/