Exproprier ou construire ?
25 sept. 2021A propos de la position du DKP-Berlin (Parti communiste allemand) sur la politique des loyers à Berlin. Contribution de Christian Sprenger, candidat aux élections à la chambre des députés de Berlin
Traduction de ML pour « Solidarité internationale PCF – Cahiers communistes ». Article publié dans l’édition du 10 septembre 2021 de Unsere Zeit (hebdomadaire du DKP). Les élections législatives et régionales ont lieu le 26 septembre, ainsi qu’un référendum consultatif sur le rachat de logements par la Ville de Berlin.
La bataille électorale entre dans sa dernière phase et la question du logement, après celle du « Corona », est le sujet central, du moins à Berlin et dans les autres grandes métropoles. Cela résulte-il du thème des expropriations auquel personne n’échappe, au succès de la campagne « Pour l’habitat allemand, exproprier » ? Ou bien cela est-il dû d’abord au contexte de fort mécontentement et d’immenses actions des locataires ces dernières années ? Samedi 4 septembre encore, s’est déroulée à nouveau une grande manifestation des organisations de locataires dans la capitale sous le mot d’ordre : « ensemble contre la hausse des loyers et les expulsions ». Le jour du vote, le 26 septembre, on votera en tout cas à Berlin pour ou contre « l’expropriation ». Le DKP-Berlin a pris position dans une affiche électorale spéciale : « Exproprier, oui, mais pas n’importe comment ! Pas un sou pour les groupes immobiliers ! » Cela doit traduire que les communistes berlinois se prononcent pour le oui dans le référendum sur les expropriations, mais aussi qu’ils critiquent la campagne menée pour l’achat ou le rachat d’immeubles au prix de milliards aux frais du contribuable, telle que la propagent les sociétés immobilières et le Sénat de Berlin [équivalent du Conseil de Paris – NdT].
La campagne, justifiée, pour les « expropriations » devient une coquille vide. Elle n’amène rien d’autre que ce que la municipalité « rouge-rouge-verte » [Socio-démocrates + « gauche » + « verts » - NdT] pratique déjà à savoir le rachat à prix fort de logements anciennement publics, bradés par la même équipe. Cela fait déjà des années. Ensuite les groupes privés qui ont encaissé les loyers et laissé les logements dans un état lamentable. Les revendent. Les uns et les autres s‘accordent pour cacher, en général, le prix de rachat. Quand il est connu, on voit bien que c’est une affaire en or pour les groupes propriétaires. Si l’on mettait en œuvre les propositions de la campagne, dans une logique de « Business as usual » [« Les affaires comme d’habitude » - « Les affaires sont les affaires » en anglais - NdT], mais à un plus haut niveau. Racheter 240000 logements sociaux reviendrait, au bas mot, à 34 milliards d’euros. Sans doute encore davantage après un jugement d’un tribunal bourgeois. Comprenons-nous bien : le budget global de la Ville de Berlin s’élève à peu près à 30 milliards d’euros par an. Le vote des Berlinois ne sera que consultatif, pour donner le change, mais c’est le Sénat qui décidera en fin de comptes. C’est dans la même logique que la campagne nationale, portée notamment par le DGB et plusieurs associations de locataires, « stop aux augmentations de loyer », pourrait avoir un certain succès. Elle demande que le principe du « plafonnement des loyers » qui a fait la preuve de son échec à Berlin, soit étendu à tout le pays.
Dans son affiche électorale, le DKP met en avant la revendication des communistes, à savoir un vaste programme de construction de logements sociaux municipaux. La construction de 100000 logements sociaux de qualité par la Ville revient à peu près à 8 milliards d’euros. Dans son programme actuel pour Berlin, le DKP réclame la construction de 30000 habitations de ce type de par an. Ils doivent rester propriété publique et être gérés démocratiquement, ni en SARL ou en société anonyme. Les loyers doivent être fixés indépendamment de la logique du marché et du profit. Ce serait une mesure absolument sans précédent, un recul inédit de l’emprise capitaliste sur le logement, une base antimonopoliste, tout cela même si la formule « expropriation » n’y figure pas.
Si on y réfléchit, « exproprier à juste titre », donc sans indemnisation, cela s’est déjà produit. A partir de 1945, dans la zone d’occupation soviétique, puis en RDA. A l’époque, il y avait l’Armée Rouge qui avait les forces pour assurer l’exécution, suivie par les forces armées de la RDA, notamment l’Armée nationale populaire, la police populaire ou les groupe de combat de la classe ouvrière. Il régnait alors, fondamentalement et visiblement, un ordre social plus juste, avec les conditions réunies pour mettre à l’ordre du jour les expropriations. Cela est-il réaliste pour l’instant ?
Il manque de logements. Nous refusons tout profit aux spéculateurs immobiliers. Donc il faut construire des logements, des logements sociaux et municipaux !
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