11ème rencontre des PC (14) - PC Libanais: « Le mouvement communiste doit passer à l'offensive et coordonner les luttes des travailleurs à l'échelle internationale »
31 déc. 2009 Intervention du Parti Communiste Libanais (PCL)
« Le mouvement communiste doit passer à l'offensive et coordonner les luttes des travailleurs à l'échelle internationale »
11 ème rencontre des Partis Communistes et Ouvriers – New Delhi, 20-22 Novembre 2009
Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Intervention du Dr. Marie-Nassif Debs, Parti Communiste Libanais
Avant-Propos
Les contradictions du système capitaliste conduisent souvent à des crises, petites et grandes, qui éclatent de temps en temps, laissant dans leur sillage la destruction économique dont les répercussions touchent, inévitablement, les travailleurs. On peut même soutenir que ces contradictions n'explosent et ne connaissent un tel dénouement uniquement quand le développement des forces productives commencent à approcher et à menacer les limites étroites de la propriété privée des moyens de production. Dans ce cas, la bourgeoisie agit de sorte à provoquer une crise, tentant ainsi d'empêcher les travailleurs de changer réellement les choses.
L'analyse de la seconde moitié du vingtième siècle montre que plusieurs crises ont éclatées au cours de cette période; peut-être la plus importante d'entre elle est la crise de 1974, qui a éclaté à partir de l'embargo sur le pétrole qui était, à son tour, une réaction à l'agression Israélienne contre les pays Arabes. La crise de 1981 était tout aussi importante, et a duré comme la précédente à peu près 16 mois, elle a touché les économies des grands pays capitalistes et a eu des effets négatifs sur les travailleurs dans ces pays. Dans ce contexte, on doit aussi prendre en compte la crise du début du siècle (en 2002-2003) qui a ébranlé le système capitaliste mondial et a mis à jour les mécanismes internes du système boursier de Wall Street, où dominaient la tromperie et le mensonge.
Toutes ces crises n'ont pas grand-chose à voir avec la crise structurelle actuelle qui, selon les experts les plus optimistes, est prévue pour durer au moins trois ans, avec des conséquences encore plus dévastatrices que celles de la crise de 1929, et ses effets domino qui ont finalement conduit le monde à la seconde guerre mondiale.
Dans le Manifeste du Parti Communiste, Marx et Engels soulignent que « le régime bourgeois de la propriété, cette société bourgeoise moderne, qui a fait surgir de si puissants moyens de production et d’échange, ressemble au magicien qui ne sait plus dominer les puissances infernales qu’il a évoquées. » Ils ajoutent, dans le contexte des crises récurrentes qui menacent l'existence de la société bourgeoise, « Chaque crise détruit régulièrement non seulement une masse de produits déjà créés, mais encore une grande partie des forces productives déjà existantes elles-mêmes »; - Comme si la société se trouvait subitement ramenée à un état de barbarie momentanée.
Sur la base de cette analyse, on peut dire que la bourgeoisie a réussi depuis à surmonter les petites et les grandes crises « en détruisant par la violence une masse de forces productives ; de l’autre, en conquérant de nouveaux marchés et en exploitant plus à fond les anciens » Cela n'aboutit, selon le Manifeste, « qu'à préparer des crises plus générales et plus formidables et à diminuer les moyens de les prévenir. »
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Comment la Crise se manifeste-t-elle de nos jours?
Premièrement, la crise se manifeste par ses répercussions brutales sur la production de biens et de services; c'est-à-dire sur l'économie réelle. L'effet couplé de l'accumulation de stocks de marchandises et du rétrécissement des marchés, en d'autres termes de la chute importante de la demande par rapport à l'offre, a aggravé une situation qui se dégradait déjà à cause de la forte baisse enregistrée dans le secteur du crédit.
C'est ce qui s'est passé l'année dernière aux Etats-Unis, où l'effondrement des prix de l'immobilier a provoqué une grave crise dans l'industrie du bâtiment et brisé les vies de millions de travailleurs dans ce secteur. Cela s'est ajouté à la crise de l'industrie automobile et à la baisse de la demande pour les industries annexes et pour les produits pétroliers. Cela a aboutit à une réaction en chaîne touchant tous les secteurs de l'économie Américaine et mondiale qui s'est accompagnée d'une hausse des taux de chômage dans le monde entier et, par conséquent, d'une baisse du niveau de vie des masses.
Et donc, depuis fin 2008, et selon le Bulletin du Bureau National de Recherche Economique, les Etats-Unis et, avec eux, les plus gros exportateurs parmi les pays industrialisés sont plongés dans une récession sévère. En fait, l'étude parle d'une évolution négative qui pourrait perdurer jusqu'en 2010; accompagnée par une baisse de la production industrielle, une baisse du PIB et une hausse du chômage puisque le BIT prédit que plus de 2 millions d'emplois vont être supprimés au cours de cette année – un chiffre qui, selon certains experts, est une sous-estimation par rapport au nombre d'emplois déjà supprimés.
Ces événements se déroulent au moment où les grands pays capitalistes sont le théâtre d'un accroissement de la concentration bancaire; ainsi que d'une intervention directe et importante des autorités publiques dans ces pays pour aider les banques en difficulté. A ce propos, des milliards de dollars ont déjà été gaspillés, et désormais les Etats-Unis et l'Union Européenne examinent la possibilité de pomper 2 300 milliards de plus en bonds du trésor pour financer la dette publique et garantir les profits du secteur bancaire tout en ne traitant pas la question des salaires excessifs et des bonus que touchent les cadres dirigeants du secteur.
Cette intervention directe a emmené certains économistes soi-disant de gauche à proclamer haut et fort que les Etats-Unis et l'Union Européenne mettaient en oeuvre désormais la théorie Marxiste, qui fait référence à la nécessité de l'intervention de l'Etat. Même si ce que Marx voulait vraiment dire par intervention de l'Etat doit se comprendre dans un processus de redistribution des richesses, bien que limitée, en prenant à la bourgeoisie pour donner aux pauvres et aux classes laborieuses – c'est-à-dire en donnant aux travailleurs, tout le contraire de ce qui se passe aujourd'hui.
Deuxièmement, comme dans le reste du monde, dans notre monde qui est toujours sur la voie du développement, les conséquences de la crise sont encore plus douloureuses et graves. Elles sont les suivantes:
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Dans les grands pays industrialisés capitalistes, il y a eu une baisse importante du volume des importations en provenance des pays du Tiers-Monde; qui a eu un impact très grave sur leurs économies puisque les pays sous-développés n'ont que leurs matières premières à vendre. En outre, la grande majorité des classes dirigeantes dans ces pays, en particulier dans les pays producteurs de pétrole, et encore plus dans les pays Arabes producteurs de pétrole – la plupart de ces régimes sont directement liés aux intérêts du capitalisme, et donc les conséquences de la crise sont allées bien au-delà de la simple chute des exportations, puisque cela a même compris pour ces pays, en particulier dans la première moitié de l'année 2009, le fait de payer une bonne partie de la facture de la crise. Ces régimes dans les pays Arabes producteurs de pétrole ont récemment admis qu'ils avaient contribué à hauteur de 800 milliards de dollars (certains disent 1 200 milliards de dollars) pour arrêter la descente aux enfers de l'économie Américaine. Bien sûr, le chiffre ci-dessus exclut la République d'Irak dont le niveau de vol et de pillage est illimité,
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Une baisse des liquidités et de l'investissement, accompagnée par de graves problèmes dans le secteur bancaire, et une crise monétaire puisque les monnaies locales étaient considérées comme peu fiables et car la dette de ces pays est liée au dollar qui connaissait alors une baisse de son taux de change – en d'autres termes une perte de son influence. Ce sont ces événements qui ont poussé l'Arabie Saoudite, par exemple, qui a des liens très étroits avec Washington, à affirmer il y a quelques jours, et pour la seconde fois en quelques mois, sa détermination à réduire sa dépendance envers le dollar et à diversifier sa réserve de change pour y inclure sa monnaie locale et d'autres monnaies étrangères.
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Le Liban ne fait pas exception au tableau décrit ci-dessus pour ce qui est de l'ampleur de la crise et de ses conséquences négatives sur notre économie; surtout depuis qu'elle a été transformée en une économie complètement dépendante des importations, y compris les importations de biens agricoles et industriels qui ne sont désormais plus produits à la fois à cause de la guerre civile et des multiples agressions Israéliennes et à cause de la nature de notre bourgeoisie qui concentre sa présence dans le secteur bancaire (et le secteur de l'immobilier qui est un sous-secteur du secteur bancaire). Et donc la richesse de cette bourgeoisie ne cesse d'augmenter de manière astronomique, à la fois à cause des prêts qu'elle accorde au gouvernement (y compris des dettes contractées en devises étrangères) et ses IDE, en particulier en Afrique. C'est particulièrement important car cette année la dette publique a atteint les 50 milliards de dollars, ce qui fait du Liban un des pays ayant le plus fort taux d'endettement rapporté au PIB. En fait, on peut dire qu'une grande part de la dette publique est contractée vis-à-vis des banques – à la fois du secteur bancaire local et étranger, et avec taux d'intérêts élevés, ce qui rend le Liban vulnérable aux fluctuations monétaires et fiscales, en particulier parce que l'économie Libanaise est directement et complètement liée au dollar.
2. Un programme et des solutions pour sortir de la crise
Il y a plus d'un milliard de personnes qui souffre de la faim dans le monde, l'équivalent de 1/6 de la population humaine globale – un pourcentage sans précédent dans l'histoire de l'humanité
A une époque où l'aide extérieure fournie par le groupe du G8 aux pays pauvres n'a pas dépassé les 21 milliards de dollars (selon le Proramme Alimentaire Mondial – PAM); la somme totale des bonus dans le secteur bancaire aux Etats-Unis a atteint les 140 milliards de dollars – une augmentation de 23% par rapport aux chiffres de 2008 (selon un rapport publié par le Wall Street Journal).
Cette situation a eu des conséquences politiques, parmi lesquelles la radicalisation des changements importants se déroulant en Amérique Latine. Cela a aussi mené à des rassemblements de masse et des manifestations parmi lesquelles, par exemple, celles qui se sont déroulées en Islande et en Grèce, tout comme les manifestations en Russie où les communistes sont descendus dans la rue pour protester contre les politiques économiques du gouvernement. Cela s'ajoute aux mouvements de résistance, en particulier la résistance nationale en Palestine et au Liban. Actuellement, l'impérialisme Américain, avec l'Union Européenne et Israel (dans notre région, en Afrique et en Amérique Latine) essaient de passer à l'offensive en Asie en tentant de prendre le contrôle des voies d'approvisionnement de pétrole et de gaz et de maintenir et de renforcer leur contrôle sur les pays où ils sont produits. L'impérialisme Américain essaie aussi en Amérique Latine d'étouffer et d'étrangler le mouvement pionnier prometteur de l'UNA-SUR (Union des Pays du Sud), parfois par des coups d'Etat militaires, d'autres fois en ayant recours au renforcement du dispositif de bases militaires. Dans ce contexte, nos partis doivent développer un programme de travail et un plan par étapes visant au dépassement du capitalisme.
La solution se trouve dans le dépassement du capitalisme et en suivant la voie du socialisme, tout en prenant en compte tous les facteurs qui ont mené à l'échec des tentatives passées, en essayant de les analyser et d'en tirer les leçons.
Pour ce qui est des étapes actuelles de notre projet, notre avis est que nous devons rassembler des forces en vue d'un objectif prioritaire, débarrasser le monde du néo-libéralisme, en se concentrant sur les éléments suivants:
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Intensifier la lutte pour éliminer les taxes indirectes et se concentrer au contraire sur l'imposition des fortunes;
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Défendre, maintenir et développer le secteur public, et résister contre les tentatives de privatisations. Cela doit s'accompagner de plans d'actions tangibles dans chaque pays pour relancer le processus de production et organiser les salariés en syndicats, correspondant aux différentes professions.
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Intensifier la lutte pour obtenir la réévaluation des salaires des travailleurs et maintenir le pouvoir d'achat de ces salaires; pour un mettre un terme aux licenciements de masse; et pour lutter contre la tendance lourde à la casse des acquis sociaux.
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Intensifier la lutte pour la réorganisation de la sécurité sociale qui assure des services sociaux et médicaux aux travailleurs et aux pauvres; tout en appelant à une amélioration de l'éducation publique et en concentrant nos efforts sur cette question.
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Intensifier la lutte pour la redistribution des richesses superflues détenues par les 1% de la population mondiale; afin de combattre la faim et réaliser les objectifs sociaux des classes laborieuses par une redistribution d'une grande partie de la valeur de la production.
Notre mouvement doit passer à l'offensive, pas seulement dans chaque pays isolément, mais aussi en accordant l'importance nécessaire à l'offensive à l'échelle internationale, en partant des conditions particulières à chaque pays pour s'élever à la conscience de la situation générale dans laquelle nous nous trouvons et qui nous unit.
Site du Parti Communiste Libanais: http://www.lcparty.org/
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