apicella Fiat voluntas PomiglianiChantage du patron de FIAT à l'usine de Pomigliano: alignement sur les conditions de travail des ouvriers polonais ou fermeture de l'usine



Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net



Quelques mois après avoir annoncé la fermeture de l'usine de Termini-Imerese (Sicile) pour 2011 et le licenciement de 1 500 ouvriers, alors que des rumeurs de plans sociaux concernant 5 000 ouvriers de l'entreprise dont 2 500 à Turin se font de plus en plus insistantes, le PDG de Fiat, Sergio Marchionne, a présenté son offre comme une offrande. Un cadeau empoisonné, en fait.



L'alignement des conditions de travail des ouvriers italiens sur celles de leurs collègues polonais



Alors que la production de Fiat est délocalisée pour une grande partie en Pologne, à l'usine de Tychy, où sont assemblées les mythiques Cinquecentoet Panda, Marchionne a proposé de produire la nouvelle Panda  à Pomigliano, lieu de production historique d'Alfa Romeo (racheté depuis par FIAT), situé dans la banlieue napolitaine. Ce changement permettrait à l'usine en déshérence de tourner à plein régime, et de passer de 35 000 unités à l'an à 270 000. Pour une usine dont la fermeture semblait inéluctable, cela semble un beau cadeau.



Mais tout cadeau suppose une contre-partie. Dans le plan de FIAT, cela suppose l'alignement des conditions de travail des travailleurs italiens sur celles de leurs collègues polonais. Une proposition à prendre ou à laisser:



  • réduction du temps de pause journalier de 25%, de 40 minutes à 30 minutes;



  • augmentation du nombre d'heures supplémentaires annuelles, 80 heures de plus, soit 2 semaines supplémentaires de travail;



  • installation de 18 rotations hebdomadaires, selon le système des 3-8, 6 jours sur 7, 24 heures sur 24;



  • augmentation des cadences avec mise en place de nouvelles méthodes de calcul chronométriques imformatisées basées sur le modèle dit WMC qui automatise le calcul du temps nécessaire à chaque opération et supprime les coefficients de difficulté de réalisation de certaines tâches. Par exemple, il est désormais estimé que chaque ouvrier doit réaliser son opération en 72 secondes, et doit effectuer 350 opérations de ce type en 8 heures.



  • suppression des indemnités-maladie en cas d'absentéisme jugé « anormal » par la direction de l'usine;



  • procédures pénales allant jusqu'au licenciement en cas de non-respect de clauses de l'accord, ce qui de fait aboutit à menacer toute grève contre ces mesures comme passible du licenciement;



Augmentation de la plus-value relative (productivité) et absolue (allongement du temps de travail), menace sur les droits sociaux et syndicaux des travailleurs, et à qui profite le forfait? Au patron, dont l'objectif reste de produire 25 voitures de plus par jour, et 6 650 supplémentaires à l'an.

 

 

La direction et le ministre du Travail salue la « collaboration » des syndicats réformistes

 

 

Devant ce plan d'exploitation généralisée, le refus catégorique du côté syndical semble s'imposer. Et pourtant, le 11 juin dernier, c'est avec fierté que Marchionne pouvait brandir le papier de l'accord signé par quatre des cinq syndicats de l'usine: la FIM-CISL, l'UGL, FISMIC et l'UILM. Les deux premiers sont des syndicats réformistes membres de la CES, les deux derniers des « syndicats maison ». Sacconi, ministre du Travail, s'est fait une joie de saluer la « collaboration »des partenaires sociaux.



Il s'est même permis d'ajouter une phrase lourde de sens: « L'accord de Pomigliano est un accord qui fera école ».

 

 

La FIOM (syndicat de classe) seule contre tous, même contre sa maison-mère la CGIL

 

 

fiom-cgil.jpgUn seul syndicat s'est élevé contre cet accord, la FIOM, à la fois branche métallurgiste de la CGIL et syndicat aux structures autonomes, la FIOM est connue pour avoir maintenu une ligne de classe face à une maison-mère qui glissait de plus en plus vite vers le réformisme et la collaboration de classe. La FIOM a manifesté son refus catégorique de signer l'accord considérant « impossible que le texte soit signé, car il présente des éléments juridiques illégitimes ». La FIOM appelle déjà à une journée de grève à Pomigliano pour le 25 juin, jour de la grève générale en Italie.

 

 

Si la FIOM a adopté une position claire, c'est loin d'être le cas de la CGIL, syndicat historiquement lié au Parti Communiste Italien. Par la voix de son secrétaire-général Guglielmo Epifani, dans une interview accordée au Corriere della Sera, elle a tenu à se distancier des positions de la FIOM: « la FIOM aurait dû en discuter avec nous d'abord ». Le secrétaire-général critique « deux points qui touchent les droits fondamentaux de la grève et de la maladie »mais se dit prêt à un accord« si ces deux points sont révisés dans la proposition de la direction ». On cède sur les deux mesures-phares et on laisse passer le reste. L'essentiel. C'est peu ou prou, entre les lignes et derrière les envolées lyriques, la position exprimée par Nicky Vendola – ancien dirigeant liquidateur du Parti de la Refondation Communiste et coqueluche des médias depuis – dans il Manifesto.

 

 

Un référendum « le couteau sous la gorge »: acceptation de l'accord ou fermeture de l'usine

 

 

Pour faire passer un accord qui n'a aucune valeur sans la signature de la FIOM, la direction est prête au coup d'Etat dans les urnes. Un référendum « le couteau sous la gorge » ouverts à tous les salariés de l'usine, le 22 juin prochain, où ils auront le choix de la sauce à laquelle ils seront mangés. Soit ils acceptent le plan, soit l'usine ferme, comme le précise posément le PDG de la Fiat: « Nos demandes ne sont pas extraordinaires (sic), soit on trouve un accord et la production démarrera en 2011, sinon on la fera ailleurs ».



federazionesinistraDans de telles conditions, avec la « collaboration »des quatre syndicats maison et avec une FIOM minoritaire, le secrétaire-général du Parti des Communistes Italiens (PdCI), Oliviero Diliberto, parle d'un « coup de force (golpe) envers les droits des travailleurs ». Le secrétaire-général du Parti de la Refondation Communiste (PRC), Paolo Ferrero, a raison de parler d'un accord « diktat » et d'un référendum « plébiscite » et de considérer que « ce référendum n'a aucune valeur ».

 

 

Un accord qui s'insère dans la remise en cause générale de la Constitution née de la Résistance




A juste titre, le secrétaire-général de Refondation Communiste insère cet accord dans l'attaque générale contre les conventions collectives (garantie par l'article 39 de la constitution), avec l'individualisation des contrats de travail. Avec l'introduction de l'arbitraire dans les procédures de licenciement (article 18), c'est l'ensemble de la Constitution italienne démocratique qui est remise en cause, et en premier lieu son article 1: « La république italienne est fondée sur le travail ».



Un accord qui s'inscrit donc dans la remise en cause de la Constitution démocratique et sociale, fortement empreinte des idées du Parti Communiste Italien et de la lutte nationale dans la Résistance, objectif affiché ouvertement par Berlusconi.

 

 

Vers l'économie sociale de marché? Dévoiler l'idéologie et la réalité de l'UE en action à Pomigliano

 

 

Pour la remplacer par quoi? Laissons Giulio Tremonti, ministre de l'Economie, proche de la Ligue du Nord, lâcher le mot: « la bonne voie est celle de l'économie sociale de marché, la bonne voie est celle de Pomigliano ».



Économie sociale de marché, idée indissociable de cette Europe sociale, idéologie destinée à mieux faire passer la pilule de cette Europe du patronat qui est l'idée et l'action qui a guidé et guide toujours la construction européenne. Mise en concurrence des travailleurs, remise en cause des droits démocratiques et sociaux conquis dans le cadre national, valorisation des « partenaires sociaux »membres de la CES, tout cela auréolé d'une idéologie européenne « sociale »reprise même par les ministres d'extrême-droite, voilà l'Europe en action que l'on retrouve à Pomigliano.



Si les forces de la FIOM semblent bien faibles pour faire face à la machine de guerre économique, médiatique, syndicale et politique que peut mobiliser le patronat, si un Parti Communiste fort et uni fmanque toujours cruellement à nos camarades italiens, on ne peut refuser de se battre, car en plus de la lutte contre l'exploitation et pour les droits fondamentaux des ouvriers de Pomigliano, c'est in finela lutte pour la démocratie italienne en péril qui se joue sur ce terrain.

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