Crise irakienne et percée des islamistes, 10 ans après la guerre d'Irak : le désastre de la politique de guerre anglo-américaine
18 juin 2014
Crise irakienne et percée des islamistes, 10 ans après la guerre d'Irak : le désastre de la politique de guerre anglo-américaine
Intervention de Jeremy Corbyn, député travailliste (Labour) pour Islington-nord, publiée dans Morning Star – quotidien communiste
Traduction MA pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
David Cameron était dans sa forme « D-Day » au Parlement mercredi dernier.
Tout juste revenu de son séjour sur les plages des Normandie, auprès des vétérans qui ont héroïquement combattu le fascisme, il a tenté de se servir d'eux pour justifier sa politique militaire interventionniste, partout dans le monde.
Peut-être aurait-il dû réfléchir un moment sur le fait que depuis 2001, il y a 13 ans, la Grande-Bretagne s'est engagée dans des guerres en Afghanistan, en Irak, en Libye, et qu'elle a également soutenu l'opération militaire au Mali.
Les Premiers ministres qui se sont succédés, y compris Tony Blair et Gordon Brown, ont accompagné une politique d'extension colossale de l'OTAN en une force mondiale, et avec le Traité de Lisbonne ils ont lié l'OTAN et l'Union européenne de façon à en faire une seule et même chose.
Mais si Cameron, Barack Obama et le président français Hollande jetaient un bref coup d’œil au reste du monde, ils verraient les conséquences des interventions occidentales.
Même si personne ne peut se satisfaire du passif en termes de droits de l'Homme de Saddam Hussein, l'Irak ne menaçait personne d'autre en 2003, et n'était certainement pas un centre pour les opérations d'Al-Qaeda.
Après 10 ans, et plus de 1 000 milliards de $ de dépenses militaires ainsi que la perte de centaines de milliers de vies irakiennes, le pays est désormais confronté à une grande insurrection qui a balayé l'armée irakienne à Mossoul et Tikrit, causant l'exode de centaines de milliers de personnes.
Combien de temps avant que le gouvernement irakien ne demande le retour des forces occidentales pour protéger Bagdad et les puits de pétrole du pays ?
L'Afghanistan, avec un déploiement de troupes de l'OTAN encore plus ancien, est plongé dans une instabilité chronique et une paupérisation profonde, et est devenu un terrain de jeu pour tester les drones et les méthodes de surveillance modernes, utilisés contre des gens miséreux.
Obama a désormais convenu du déploiement de près de 14 000 troupes américaines, de l'OTAN et d'autres troupes internationales de façon permanente en Afghanistan et du maintien de bases sur place, tout comme les Etats-unis cherchent à garder leurs bases dans toute la région.
La Libye était présentée comme une grande « success story », à la suite de l'intervention inspirée par John McCain.
Elle se trouve désormais empêtrée dans une guerre civile, étant un point de départ pour certains des réfugiés les plus désespérés fuyant les conflits dans tout le Moyen-Orient et l'Afrique du nord, qui cherchent à trouver en Europe un havre de paix.
Il y a assurément de sérieuses leçons à tirer de la façon dont les forces occidentales ont opéré ces 13 dernières années mais aussi sur le rôle de l'OTAN comme principale force motrice de la re-militarisation de l'Europe.
Le Times du 2 juin informait du fait que la Grande-Bretagne était impliquée dans des pourparlers, et envisageait sérieusement d'envoyer des troupes en Pologne, Estonie et Ukraine, pas uniquement dans le cadre d'exercices militaires de l'OTAN mais pour venir en appui des forces armées de ces pays.
Quand la députée Helen Goodman l'a interrogé sur ce point, Cameron a balayé cela d'un revers de la main, indiquant que cela n'était pas d'une grande importance.
Lorsque je l'ai questionné sur le rôle expansionniste de l'OTAN qui pourrait susciter une augmentation des dépenses militaires de la Russie dans la région, il a laissé entendre que cela n'était pas la bonne façon de considérer notre politique étrangère.
La situation de gens désespérés fuyant ces guerres occupe nos écrans de télévision, sans compter ceux qui fuient la Syrie pour se rendre en Turquie et au Liban.
Quoique la Grande-Bretagne n'y soit pas directement engagée, il est tout aussi clair que l'argent américain, ajouté au soutien militaire saoudien et qatari et à l'entraînement britannique, alimentent le conflit syrien et rendent la conclusion d'un cessez-le-feu et d'une réouverture du processus de Genève toujours plus difficiles.
Il ne fait aucun doute qu'il est grand temps d'avoir un débat sérieux sur la politique étrangère et de défense de la Grande-Bretagne.
Plus de 60 ans d'adhésion à l'OTAN a porté nos dépenses militaires à des niveaux considérables, et notre relation spéciale avec les Etats-unis, via l'OTAN et l'Accord de défense mutuelle, nous a impliqué dans des conflits innombrables.
Dans un monde émaillé de conflits, portant souvent sur la lutte pour les ressources naturelles et alimentés par la course aux armements des marchands de canons, il est bien sûr temps de revoir nos priorités pour une politique étrangère basée sur les valeurs humaines, le développement pacifique et non sur l'exacerbation des agressions militaires.
J'espère qu'il y aura un vaste débat sur une politique étrangère qui ne soit pas basée sur les intérêts des penseurs militaires de l'OTAN ou des grandes multi-nationales américaines.
Le nouveau désastre en Irak, si il fallait un cas de plus, nous montre qu'il est grand temps de changer du cap.
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