1902UE2Débat sur la « Stratégie 2020 » de l'UE à Lisbonne



Fuite en avant du grand capital



Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/



Dix ans après l'adoption de la « Stratégie de Lisbonne », le capitalisme se trouve plongé dans une des crises les plus profondes de son histoire et entraîne les peuples dans le chômage et la misère.



Les orientations politiques et économiques mises en œuvre de manière plus intensive durant la dernière décennie n'ont pas seulement eu des conséquence désastreuses pour l'ensemble des travailleurs et pour la majorité de la population, elles ont contribué également à accélérer et à approfondir la crise du système capitaliste.



Face à la gravité de la situation économique et sociale actuellement dans tous les pays de l'Union Européenne, les travailleurs et les autres couches sociales dans plusieurs pays réclament un changement complet de politiques avec mise en oeuvre de mesures qui mettent un frein à leur paupérisation absolue.



Toutefois, comme l'a signalé le secrétaire-général du PCP, Jeronimo de Sousa, lundi 10 mai, à Lisbonne, la « Stratégie 2020 », récemment présentée, passe sous silence les « conséquences néfastes de sa prédécesseur », maintient et approfondit « le cap néo-libéral des politiques de l'Union Européenne » et insiste sur « la sortie de crise par l'intensification de l'exploitation et des aides au grand capital ».



Intervenant en clôture du débat promu conjointement par le PCP et par le Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche Verte Nordique, Jeronimo de Sousa, a parlé de « faillite » par rapport aux objectifs proclamés en mars 2000, à Lisbonne, dénoncés à ce moment-là par les communistes et rejetés dans la rue par une grandiose manifestation de la CGTP-IN avec plus de 70 000 personnes.



Mais si aujourd'hui, comme ils l'affirmaient, la promesse alors faite de transformer l'UE en l'économie « la plus dynamique du monde », avec « croissance stable » et « plein emploi » suscite des « sourires » chez certains, chez d'autres « on essaie de se défausser de sa responsabilité en regardant ailleurs », le désastre social causé par les politiques du capital est bien exprimé dans les chiffres collectés par la Commission Européenne elle-même.



Comme l'a souligné le secrétaire-général, « la production industrielle est revenu au niveau des années 1990, le chômage touche 10% de la population active soit 23 millions de personnes, 21% des jeunes n'ont pas droit à un travail, il existe 83 millions de pauvres dans l'Union Européenne et le PIB de l'ensemble des Etats-membres de l'Union Européenne a chuté de 4% au cours de la seule année écoulée ».



A qui profite la Stratégie 2020?



Cependant, comme la crise n'est pas pour tout le monde, la « Stratégie de Lisbonne » a eu également ses bénéficiaires. Jurgen Klute, député allemand qui a participé au débat aux côtés de Kartika Liotard (Hollande) et Dmitris Christodoulou (Chypre), a fait remarquer que les politiques de diminution des salaires et des droits des travailleurs, d'augmentation de la précarité et de destruction des services publics ont eu comme effet symétrique une concentration croissante de la richesse et une aggravation des inégalités.



Même dans l'économie la plus développée d'Europe, les travailleurs ont perdu du pouvoir d'achat et vivent aujourd'hui moins bien qu'il y a dix ans. Si on a en tête que la réduction des « coûts du travail » était un objectif central de la « Stratégie de Lisbonne », il ne reste aucun doute sur le fait que, dans ce domaine, son succès fut total.



Autre exemple de ce « succès », mentionné par l'économiste José Alberto Lourenço, c'est le secteur financier national qui, en une décennie de stagnation et de récession, a réussi à croître à un rythme de 3% par an et à accumuler des dizaines de milliards d'euros.



Dans ce sens, Jerónimo de Sousa a mis en garde: « Si elle n'est pas vaincue par la lutte, la Stratégie 2020 sera synonyme de nouveaux succès pour le capital au prix de la destruction de ce qui reste des fonctions sociales des Etats, au prix de la destruction des appareils productifs des économies les plus fragilisées par la dépendance économique, au prix de plus de chômage, plus de bas salaires, moins de droits sociaux et de droit du travail, plus de pauvreté et d'autres fléaux sociaux qui se propagent à travers l'Europe, comme la faim ».



Situant le problème sur « le terrain de la vieille et si actuelle lutte de classes », le secrétaire-général du PCP a affirmé: « S'il est légitime de se demander 'A qui profite' la Stratégie 2020, la même question s'impose aussi pour ce qui est du Pacte de Stabilité, de l'Union Economique et Monétaire, de l'Euro, de la BCE, de la politique extérieure de l'Union Européenne et des Traités – comme celui de Maastricht ou celui de Lisbonne. En somme, la question s'impose pour ce qui est de cette Union Européenne néo-libérale, fédéraliste et militariste. Et la réponse, nous la trouvons aussi dans cette stratégie 2020: elle sert de plus en plus des intérêts étrangers à ceux des travailleurs et des peuples d'Europe ».



Combattre la régression sociale



Bien que la Commission Européenne reconnaisse elle-même, comme l'a rappelé dans le débat la députée Ilda Figueiredo, que « la crise a réduit à néant des années de progrès et de stabilité sociale », les orientations stratégiques de Bruxelles se taisent sur leurs objectifs sociaux, abandonnant des objectifs emblématiques qui pendant des années ont orné sa propagande, comme c'est le cas du plein emploi ou de l'éradication de la pauvreté.



La même chose a été soulignée par Kartika Liotard, du Parti Socialiste de Hollande, soulignant que la Stratégie 2020 se résume à un ensemble d'objectifs économiques coupés des besoins sociaux.



Comme l'a également dit Dmitris Christodoulou, membre du Comité Exécutif de la Fédération Pan-Chypriote du Travail (PEO), « la réalité économique actuelle confirme, malheureusement de la manière la plus dure, que le soi-disant marché libre et la concurrence sans limite ne peuvent en aucun cas concilier objectifs économiques et sociaux ».



Et puisqu'il est sûr que la baisse du niveau de vie des peuples et l'augmentation de l'exploitation des travailleurs sont la réponse classique du capitalisme à la crise, les conséquences inévitables de cette fuite en avant se traduisent nécessairement par l'aggravation de la dépression économique, résultant de la contraction de la demande solvable, et par l'aiguisement des contradictions sociales, dont le mouvement populaire en Grèce est l'exemple le plus frappant.



Par conséquent, analysant la dégradation de la situation sociale et économique au Portugal, l'augmentation du chômage, de la précarité, la tendance à la diminution des salaires et l'annonce de mesures d'austérité encore plus drastiques, Francisco Lopes, membre de la Commission Politique du PCP et député à l'Assemblée, a souligné que les travailleurs portugais sauront répondre à cette offensive et qu'un « nouveau cycle du développement de la lutte de masses est déjà en cours ».



Et en lutte les travailleurs de plusieurs secteurs le sont déjà, comme l'a dit dans le débat Arménio Carlos, de la Commission Exécutive de la CGTP-IN, qui prévoit que le 29 Mai à Lisbonne sera une grandiose journée nationale de protestation.



De nombreuses autres interventions, comme celle de Pedro Frias sur la Santé, d'Alexandrino Saldanha sur l'Administration Publique, de Victor Narciso sur la Poste, Vitor Baeta sur le transport aérien, Joaquim Escobal sur le secteur automobile, Luis Leitão sur les industries électriques, ou encore José Martins sur les très petites, petites et moyennes entreprises, ont démontré jusqu'à épuisement que les raisons ne manquent pas pour combattre les politiques de régression sociale et de désastre économique qui frappent durement le monde du travail et compromettent l'avenir du pays.



Une offensive générale



Ne pouvant être présent au débat à cause de l'annulation de son vol provoqué par le nuage de cendre volcaniques, Charlampos Angourakis, député communiste grec au Parlement Européen, a tenu à envoyer son intervention, qui a été lue par Rita Magalhães, membre du cabinet de soutien aux députés du PCP au Parlement Européen.



Dans son texte, Angourakis souligne que l'amplification des manifestations populaires en Grèce s'explique par le fait que « de plus en plus de personnes sont convaincues que le développement capitaliste ne mène qu'à des crises, au chômage et à la pauvreté pour la grande majorité. Ils s'aperçoivent, grâce aux militants mais aussi au travail politique de masse du parti, que la crise n'est pas seulement grecque ou des pays dit des PIIGS, mais bien une crise du capitalisme en Europe et dans le monde entier ».



Rappelant la récente adoption au Parlement grec d'une diminution brutale des salaires et des droits à la sécurité sociale, Angourakis a mis en garde contre le fait qu'il s'agit « d'une question qui, malheureusement, ne concerne pas seulement la Grèce mais tous les travailleurs de l'UE qui sont contraints à payer la crise capitaliste. »



Toutes ces mesures ont été adoptées par le gouvernement grec déjà sur la base de la « stratégie 2020 », a déclaré le député, notant que celle-ci représente « un plan unique du capital qui devra être appliqué à tous les Etats-membres, avec des adaptations naturelles aux différents niveaux de développement capitaliste ».



« Mais nous sommes sûrs que la lutte populaire, l'enracinement dans les lieux de travail et la solidarité prolétarienne internationaliste peut mettre en échec la stratégie 2020 », a conclu le député grec.



Article d'Avante, hebdomadaire du PC Portugais, numéro 1902 du 13 mai

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