Décès à 95 ans de Antonio Dias Lourenço, dirigeant et député du PCP, organisateur de la résistance, prisonnier politique et directeur historique d'Avante!
25 août 2010 Décès à 95 ans de Antonio Dias Lourenço, dirigeant et député du PCP, organisateur de la résistance, prisonnier politique et directeur historique d'Avante!
Article et traduction AC http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Antonio Dias Lourenço, dirigeant historique du Parti communiste portugais (PCP) et directeur du journal Avante pendant 22 ans, est mort le 7 août dernier, à Lisbonne, à l'âge de 95 ans.
De l'ouvrier mécanicien à l'organisateur de la résistance
Né dans le village de Vila Franca (région de Lisbonne) en 1915, fils d'une couturière et d'uun forgeron, il commence enfant déjà à travailler comme tourneur-mécanicien. En 1932, à l'âge de 17 ans, il adhère au PCP.
Il joue un grand rôle dans la ré-organisation du parti dans les années 40-43, en particulier dans le Bas Ribatejo dont il est un des responsables régionaux. A partir de 1942, il est un des organisateurs de la Résistance à la dictacture salazariste, responsable de l'appareil central distribution de la presse du Parti. Parcourant le pays à bicyclette, Dias Lourenço rappelait récemment avec humour que « nous (les dirigeants du PCP clandestin) connaissions le Portugal par la géographie des bottes ».
En 1943, il entre au Comité central dont il restera membre jusqu'en 1996. Durant ces mêmes années 1940, il développe une intense activité politique qui le mène à intégrer les organismes dirigeants des grandes grèves de juillet/août 1943 et mai 1944, ainsi qu'une activité culturelle conséquente, organisant notamment les « promenades sur le Tage », permettant la rencontre des dirigeants communistes comme Alvaro Cunhal et de l'avant-garde littéraire portugaise incarnée par exemple par Soeiro Pereira Gomes, participant à la naissance du mouvement néo-réaliste portugais et à l'émergence d'un courant intellectuel de résistance au salazarisme.
17 années en prison: tortures, évasion, travail clandestin
En 1949, il est arrêté une première fois par la police fasciste et est enfermé au Fort de Peniche, prison/forteresse de la dictature, où étaient enfermés les prisonniers politiques. Interrogé, torturé, Dias Lourenço n'a jamais parlé et a toujours conservé une remarquable force morale face à la souffrance, comme il le rappelle lui-même: « Je savais déjà qu'ils aimaient voir le visage des prisonniers sous la torture. Et j'ai décidé de construire mon visage avec un léger sourire permanent. Même dans la douleur, j'ai toujours gardé un sourire ».
En 1954, il mène une des spectaculaires évasions du Fort dont il évoquait tout dernièrement la prise d'initiative en des termes simples: « J'ai vu la mer et j'ai décidé: ce sera demain! ». A sa sortie de prison, il rentre à la Commission politique en 1956 et au secrétariat du Parti en 1957, et occupe pour la première fois le poste de directeur d'Avante, organe central du PCP, en 1957 également.
En 1962, il est arrêté une seconde fois, après qu'il a participé à la grève historique du 1er mai 1962, grand moment de la lutte contre la dictature. Il subit alors de nouveaux tortures physiques et psychologiques et ne sort qu'en 1974, au moment de la réovlution d'Avril, bien qu'il ait alors prévu une nouvelle évasion spectaculaire déguisé cette fois... en femme: « J'avais la jupe, la blouse, les chaussures et deux perruques – une blonde et une brune ».
Symbole de la révolution d'Avril: de l'Assemblée de la république à la direction du journal
Devenu un des symboles de la Révolution d'Avril, (deuxième en partant de la gauche à la tribune sur la photo) par son courage personnel et politique, il devient député de l'Assemblée constituante et deviendra député à l'Assemblée de la République de 1975 à 1987. Outre sa place à la Commission politique du PCP qu'il conservera jusqu'en 1988, il récupère surtout la direction d'Avante, dont il deviendra le directeur emblématique, jusqu'en 1991, date à laquelle il se retire – comme de nombreux dirigeants historiques – de la vie du parti.
Ces dernières années, Dias Lourenço avait raréfié ses interventions, mais elles allaient toutes dans le même sens: celle d'un engagement communiste de toute une vie, de la conviction d'avoir fait le bon choix, avec un réel enthousiasme pour le mouvement de reconstruction et de relance de l'activité du Parti communiste portugais, il le disait récemment dans une interview à Avante:« Ce qui me rend le plus heureux, c'est de voir tous ces nouveaux militants qui viennent au Parti, pour prendre le drapeau et aller de l'avant ».
L'hommage du Parti à son dirigeant: une trajectoire qui se confond avec celle de son parti de toujours
Lors de ses funérailles qui ont rassemblé plusieurs centaines de militants du parti, Jéronimo de Sousa, secrétaire-général actuel du PCP a évoqué le« sentiment de perte » que la mort de Antonio Dias Lourenço provoque chez les communistes portugais. Il a ajouté ensuite que « parce qu'il a lutté tout le temps parce qu'il devait lutter, ils nous encourage aussi par son exemple. L'exemple que cela vaut la peine de lutter toujours, toujours, alors que nous sommes ici, avec cette conviction inébranlable en l'idéal communiste que, nous autres, nous perpétuons ».
Mais pour le secrétaire-général du Parti, plus que d'un adieu, ce qui a emmené ici tant de personnes, c'est de « répondre présent à celui qui a laissé dans l'histoire de la lutte des travailleurs et du peuple portugais une empreinte durable, celle d'un engagement courageux et dévoué, de la lutte pour la liberté, la démocratie et le socialisme ». Ainsi, a affirmé le dirigeant communiste, « évoquer la vie de Antonio Dias Lourenço, c'est retracer jusqu'à nos jours, la lutte de son Parti de toujours, une trajectoire qui se confond avec l'action héroïque des communistes portugais contre la dictature fasciste, contre l'exploitation et pour la construction d'une vie meilleure ». Faisant partie de l'histoire du Parti, Dias Lourenço fait partie « de cette trempe de lutteurs révolutionnaires »qui a été acteur de « l'histoire héroïque de la lutte de la classe ouvrière, des travailleurs et du peuple contre la tyrannie fasciste, pour la liberté et la dignité humaine ».
Sources: article d'Avante; communiqué du PC Portugais; article du Morning Star
Les interventions de Dias Lourenço sont extraites de trois interviews qu'il a accordé à Avante dans les années 2000
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