Lutter contre la privatisation de l'enseignement supérieur en Italie, par le secrétaire du syndicat des enseignants FLC-CGIL
17 nov. 2009 Contre la privatisation de l'enseignement supérieur, construisons la mobilisation
de Domenico Pantaleo, secrétaire-général de la FLC-Cgil
dans Il Manifesto du 31 octobre
Traduction MA pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Le projet de loi Gelmini menace les fondements de notre système public d'enseignement et de recherche
Le projet de loi Gelmini comprend une tentative de transformer radicalement l'université italienne. Tandis qu'il confirme les coupes dévastatrices de la loi 133 [loi datant de 2008 et prévoyant, outre des coupes budgétaires, un changement de statut des universités leur permettant de lever des fonds privés via des fondations], il vise à la refonder par un décret-loi dont la portée est constitutionnellement discutable. En tant que Flc-Cgil, nous jugeons inévitable une généralisation des actions de protestation qui doit nous mener à la grande grève générale de décembre. Nous lançons un appel à tous les mouvements pour construire des mobilisations pour la défense de l'éducation nationale et la recherche publique, la reconnaissance du travail et la revendication du 100% public. Pour nous, ce sera une étape importante dans la mobilisation dans laquelle nous serons engagés le 7 novembre dans la rue, le 14 novembre dans la manifestation contre la crise, les licenciements et la précarité, mais qui ne devra pas se limiter à ces dates.
Le projet de loi a été mûrement réfléchi et, contrairement à ce qu'affirme le ministre, il n'a pas impliqué les différents acteurs du milieu universitaire. Dans la lignée des normes introduites par la loi 133, il introduit une sorte de commissaire aux comptes des universités et impose un nouveau modèle organisationnel qui réduit considérablement les espaces démocratiques. Les organes élus deviennent de simples appendices, tandis que le pouvoir se concentre au sommet où siègeront, outre des représentants issus de l'université, des éléments « extérieurs » nommés par les investisseurs privés. Si tout va bien, nous aurons des conseils d'administration pleins de sièges vides ou des jetons de présence dépensés inutilement. Si les choses tournent mal, nous nous trouverons face à la privatisation immédiate de l'université, sans autre forme de procès (en se parant derrière la façade des fondations). En fait, on réduira la capacité des universités à fonctionner de manière autonome, tandis que l'on introduira une logique d'entreprise en son sein. J'ajouterais que la réduction drastique des ressources produira une fort rétrécissement du champ universitaire. Les « prêts d'honneur », par lesquels on prétend répondre à la question de l'accès aux études universitaires, transformeront nos étudiants en consommateurs endettés, dans l'esprit des modèles économiques que la crise de 2008 a touché de plein fouet. Le tout accompagné d'une augmentation continue des frais de scolarité. Tandis qu'aux Etats-Unis on cherche à introduire des éléments d'aides sociales, dans notre pays on cherche à supprimer ce qu'il en reste.
La partie la plus déconcertante du projet de loi est représenté par les normes de recrutement qui institutionnalisent la précarité. La figure du chercheur à durée déterminé devient la voie d'accès à la carrière universitaire exactement comme cela a été prévue par la loi Moratti [loi-cadre datant de 2004 et entamant le processus de privatisation de l'éducation nationale]. Toutefois, cette forme de contrat constitue l'aristocratie de la précarité. A ces cotés, se trouvent les chargés de recherche et les contrats de collaboration pour l'enseignement qui pourront ne pas être rémunérés. Évidemment tout cela se déroule sans que l'on ne prévoit de les embaucher à terme en CDI, seul moyen d'offrir un minimum de perspectives à ceux qui travaillent à l'université en effectuant des travaux de recherche et en enseignant pour des salaires dérisoires ou même gratuitement.
En somme, c'est une grande gifle aux milliers des précaires qui continuent depuis des années à faire avancer l'université. Une minorité se verra offrir comme unique débouché un CDD, la majorité sera progressivement exclue avec comme facteur aggravant le fait qu'elle ne pourra compter sur aucun mécanisme de protection sociale et d'allocations de revenu. Se créera ensuite une véritable guerre entre les pauvres, que sont aujourd’hui tous les chercheurs, et les précaires qui voudront postuler directement pour les postes de professeurs de seconde zone. Les plus jeunes, toutefois, qui auront le courage de se risquer sur la voie d'une carrière université dans un pays qui méprise les intelligences, se verront offrir un parcours pluri-annuel de précarité en tant que collaborateurs bidons (ce qui peut durer près de 10 ans), puis finalement un beau CDD de 3 ou 6 ans et ensuite l'opportunité soit d'entrer en fonction, soit de rentrer à la maison. Ce sont les précaires d'aujourd'hui et ceux de demain, c'est-à-dire les étudiants, qui doivent les premiers réagir avec force à cette attaque violente contre leur avenir. Mais la riposte ne peut être limitée à l'université. La grande manifestation de l'éducation du 30 octobre de l'an dernier et le mouvement de l' « Onda » [La Vague – le nom que s'était donné le mouvement de lutte massif dans l'Education nationale et dans les universités contre le projet Gelmini, déjà, l'année dernière] ont démontré qu'il était possible de parler à toute la société si les luttes sont authentiques. C'est l'enseignement également des manifestations des précaires de l'éducation de ces derniers jours et, avant tout, des précaires des établissements publics de recherche contre les normes Brunetta [du nom du ministre de la Fonction Publique – loi adoptée en juillet 2008 et s'attaquant directement aux droits des travailleurs: droit aux congés, à l'assurance-maladie...].
Site de l'Ernesto: http://www.lernesto.it/
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