private-prison.jpgPrivatisation des services pénitentiaires de probation en Grande-Bretagne : pourquoi 99 % des agents s'y opposent

 

En 2006, le gouvernement travailliste de Tony Blair ouvre les « services de probation » – le contrôle et la surveillance des prisonniers placés en « liberté conditionnelle », souvent assortie de travaux d'intérêt général – aux appétits du secteur privé.

 

En 2013, le gouvernement conservateur de David Cameron décide de livrer les contrats des agences régionales publiques à l'industrie privée, d'un montant de 450 millions de £, avec 200 000 prisonniers à la clé, dans un plan de privatisation des « services de probation et d'insertion ».

 

En 2014, les agents de la Justice font un bilan alarmant d'un an de logique de privatisation.

 

Éclairant pour nous au moment où la polémique a enflé cet été autour de la privatisation des services de probation en France dans le cadre de la « réforme pénale » de Mme Taubira.

 

Intro et traduction JC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

Editorial du Morning Star, quotidien communiste britannique

 

Les nouvelles du jour nous indiquent que 99 % des travailleurs des services de probation s'opposent aux plans de privatisation, cela devrait être un signal d'alarme pour notre Secrétaire à la Justice Chris Grayling.

 

Dans le passé, un taux de désapprobation de 99% aurait incité plus d'un ministre à faire machine arrière sur des réformes impopulaires.

 

Hélas, la Coalition conservateur-démocrate, comme son prédécesseur travailliste auparavant, s'enorgueillit de traiter les opinions des travailleurs qui connaissent le terrain avec dédain.

 

Les politiciens affirment toujours devant les caméras qu'ils écoutent les gens.

 

Mais de la santé à l'éducation, des prisons aux pompiers, c'est devenu une question de principe pour les ministres de déclarer la guerre aux personnels qui garantissent en fait les services en question.

 

Les ministres plastronnent, ils croient naïvement qu'ils sont « durs » et touchent à des privilèges, quand ils ignorent les conseils des enseignants pour les écoles, les conseils des docteurs pour le NHS (Service national de santé), les conseils des pompiers pour la lutte contre les feux, et maintenant ceux des agents de probation sur comment réinsérer les délinquants.

 

Rien n'est plus éloigné de la réalité.

 

La coalition ignore les conseils des travailleurs qui connaissent le terrain car la qualité du service public est quelque chose qui les laisse indifférent.

 

Donc quand on apprend que les conditions dans les services de probation sont désormais si mauvaises que plus de la moitié des agents cherchent activement un autre emploi, cela ne risque pas de faire réfléchir M.Grayling, tout comme l'ancien secrétaire à l'Education Michael Gove se fiche que 40 % des enseignants quittent la profession dans les cinq ans.

 

La raison pour laquelle les agents de probation sont si démoralisés n'est pas difficile à trouver.

 

En juin, les agences locales de probation publiques ont été abolies.

 

Le personnel a été divisé entre un Service national de probation, destiné à traiter les délinquants les plus sérieux, et 21 « compagnies de réinsertion de quartier », vouées à être vendues au privé.

 

Dans les deux cas, la pression sur eux a augmenté – 74 % des officiers disent que leur charge de travail a augmenté depuis ces changements.

 

Et le secrétaire-général du syndicat des services publics UNISON met en garde : « brader la moitié des services de probation au secteur privé, ce serait un désastre ».

 

Les agents de probation jouent un rôle vital, comme gardiens de notre sécurité.

 

La réinsertion des prisonniers, et l'évaluation du fait de savoir si les délinquants sont prêts à être libérés touche tout le monde.

 

« Ouvrir le marché à tout un ensemble de nouveaux prestataires à la réinsertion », comme le claironne le Ministre de la Justice, c'est mettre la logique du profit dans le système pénal.

 

Cela ne va pas résoudre les problèmes critiques que rencontre le réseau de prison britannique, où un nombre de prisonniers en plein explosion se combine à des coupes drastiques dans les effectifs, avec des effets fatals.

 

Le rapport sorti aujourd'hui de l'Inspection des prisons sur les conditions épouvantables dans la prison de Wormwood Scrubs, où les effectifs ont été diminués de 35 % en quatre ans tandis que le nombre de prisonniers sous leur charge ne cesse d'augmenter, est un avertissement pour le gouvernement.

 

Mais les privatisateurs ont soif de profit, ils ne vont pas résoudre les problèmes d'effectifs. Les entreprises qui ont pris le contrôle de services auparavant assurés par l’État ont fait leurs preuves quand il s'agit de supprimer des emplois. Ils n'en ont pas créé.

 

Les travailleurs coûtent de l'argent, et l'avidité à court-terme motive les parasites du secteur privé se greffant sur le secteur public. Ils ne sont pas intéressés par le bien-être à long-terme de nos quartiers.

 

Les amendes dérisoires imposées aux entreprises qui abandonnent des contrats dont ils n'ont pas atteint la moitié du terme n'inspire pas confiance sur la capacité de ces entreprises à jouer franc jeu – particulièrement pas quand les patrons de ces entreprises ne sont pas du tout sanctionnés.

 

 

La privatisation a été une catastrophe dans chaque service qu'elle a touché. Dans notre système pénal, c'est franchement dangereux.

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